La guerre internisée
Les même raisons qui ont institué la mise en spectacle de cette guerre comme une opération d’hygiène étatique mondiale, l’instituent après le cessez-le-feu comme une guerre mythique. L’exploitation de toutes les opportunités ouvertes par la guerre en vue de l’aménagement du "nouvel ordre", conduit l’État mondial à nier la guerre concrète, ses victimes, ses catastrophes, ses conséquences sur la vie et sur le devenir de l’espèce.
L’abcès irakien ayant été partiellement vidé de ses prétendues menaces d’infection immédiate, la violence militaro-politique de la guerre doit être internisée par chacun des individus effectivement touchés par son impact idéologique, afin que, façonné à son image performante, il accepte dans sa vie quotidienne tout ce qu’on lui donne comme "conséquences de la guerre". L’individu formé par l’internisation de "sa Guerre du Golfe", devrait désormais accepter des conditions économiques, sociales, politiques et existentielles qu’il ne considérait pas comme sienne auparavant. Le voilà membre de cette "Cité du Droit international" qui le place dans la double contrainte de se reconnaître comme soldat courageux de la valorisation de sa "ressource humaine" participant à l’exaltante unification de la société totalement dominée par le capital et d’être nié comme membre de la communauté humaine qu’il n’a pas perdu l’espoir de réaliser.
Doublement mondiale, cette guerre est à la fois un accélérateur de la course pour l’hégémonie étatique planétaire et un opérateur de l’internisation, par chaque individu, de son identité de particule de capital. Guerre mondiale permanente, cette guerre doit s’abstraire de son existence historique et devenir mythe : quitte à réactiver de temps à autre, de ci, de là, une matérialité du mythe dans la vie concrète des hommes